Conseils spécifiques sur la langue et l'écrit à l'attention des parents d'élève des écoles maternelles et élémentaires.
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I) L'oral
1) Généralités
Bien que rarement évalué, l'oral est la clé de voûte de l'ensemble des apprentissages. Les inégalités en ce domaine se construisent dès la première année de la vie de l'enfant. La parole se met en place dans un premier temps par imitation. Il est donc indispensable de parler à son enfant bien avant qu'il ne soit capable de produire une réponse par des mots.
2) Quel langage avec les petits ?
Le langage des parents dans les toutes premières années permet à l'enfant de se construire un répertoire de mots et de syntaxes qui lui servira encore de référence à l'école élémentaire. Il est donc indispensable de bannir tout langage "bébé". Un chien s'appelle un chien et non un wa-wa, un chien-chien ou un toutou. Il est important de donner à l'enfant l'exemple de phrases grammaticalement correctes, sans pour autant tomber dans des tournures alambiquées qui ne lui seraient pas accessibles.
3) Le statut de l'erreur
Les erreurs de langage sont normales chez l'enfant. L'adulte ne doit pas mettre en avant ces erreurs, au risque d'inciter l'enfant à s'exprimer moins ou de le persuader que la forme de son message compte plus que ce qu'il a à dire. Le rôle de l'adulte est simplement de reformuler les paroles de l'enfant. Par exemple, si l'enfant dit "Moi vouloir chocolat.", l'adulte reformulera par "Tu veux du chocolat.". Il ne se met pas, ou rarement, à la place de l'enfant. Il ne fait pas non plus répéter. Le réinvestissement se fera plus tard.
4) L'enrichissement syntaxique
Le niveau de langue qui a cours à la maison génère des inégalités à l'école élémentaire également. La production écrite de phrases correctes sera plus facile à acquérir pour l'enfant s'il a eu l'habitude d'entendre des phrases grammaticalement correctes et de syntaxes variées. Lire des histoires quotidiennement va donc jouer un rôle capital car le langage écrit présente une richesse syntaxique beaucoup plus grande que le langage du quotidien.
II) L'entrée dans l'écrit
1) Le stade de familiarisation
De 2 à 5 ans, l'enfant se construit une représentation des fonctions de l'écrit et de l'acte de lire. Il ne s'agit en aucun cas d'apprendre son enfant à déchiffrer avant l'heure. Il s'agit au contraire de développer un rapport positif à l'écrit, un rapport de plaisir, au travers de rituels comme l'histoire/câlin du soir ou la sortie hebdomadaire à la bibliothèque. Vient ensuite la question de l'utilité : Pourquoi papa lit le journal ? Pourquoi maman fait une liste de course ? (ou l'inverse bien entendu...) L'enfant qui entre au CP en ayant déjà construit un répertoire de ces différentes fonctions a un avantage certain car il sera plus facile de le motiver dans son apprentissage et de lui donner du sens.
2) Comment faire pour lire ? Comment peut-on apprendre à lire ?
Avant de s'engager tête baissée dans l'apprentissage systématique, quelle qu'en soit la méthode, il convient de prendre le temps d'installer chez l'enfants les prérequis indispensables à l'acquisition de la lecture :
* La conscience phonologique : Il s'agit de rendre l'enfant capable d'identifier un son dans un mot, de trouver d'autres mots contenant le même son, d'identifier la position d'un son dans un mot (début, milieu, fin), de repérer des rimes, de compter les syllabes sonores d'un mot, d'isoler les différents mots d'une phrase, etc...
* Reconnaître les lettres et penser mou : Connaître les lettres n'est pas apprendre à lire mais c'est un passage obligé. La reconnaissance des lettres, c'est aussi accepter qu'on ne les rencontre jamais identiques au modèle de la maîtresse. Il faut discuter avec son enfant de ces différences et l'aider à différencier les variations acceptables de celles qui rendraient la lettre méconnaissable.
* La représentation de l'activité de lecteur : L'enfant doit prendre conscience qu'en français, on écrit ce que l'on entend. Le mot "vache" n'est pas plus long que le mot "papillon", même si une vache est plus grosse qu'un papillon. Par contre, l'enfant peut deviner que "papillon" est plus long s'il est capable de compter les syllabes sonores (le faire en tapant dans les mains). Il doit avoir compris que les lettres représentent des sons et que ces sons mis les uns derrière les autres produisent les mots que l'on entend. Si cette représentation n'est pas installée, un apprentissage systématique des correspondances graphèmes/phonèmes a toutes les chances de rester sans résultat et donc de démotiver l'enfant.
* Le vocabulaire : Si on admet que lire c'est comprendre, alors l'apprentissage de la lecture n'a de sens que s'il vient compléter un langage suffisamment riche. L'enfant qui déchiffre des mots qu'il ne connaît pas, donc ne comprend pas, a de fortes chance de se démobiliser et d'abandonner la lecture. A l'inverse, un vocabulaire large facilite la compréhension des premières lectures, ce qui place l'enfant dans une dynamique de réussite.
Sans vouloir alarmer, il faut bien avoir à l'esprit qu'un enfant qui entre au CP avec un retard important dans ces quatre domaines n'apprendra pas à lire en temps voulu, quelle que soit la méthode et la compétence de l'instit. Mais cela ne veut pas dire qu'à plus long terme, une bonne équipe d'enseignants ne pourra pas "sauver les meubles".
3) Les méthodes de lecture
* Les méthodes syllabiques sont un héritage de la méthode Boscher. Elles consistent à apprendre l'enfant à combiner les sons des lettres pour déchiffrer un mot.
* Les méthodes globales consistent à reconnaître des mots dans leur totalité, sans identifier les syllabes qui les composent.
* Les méthodes mixtes font intervenir en même temps des éléments des deux méthodes précédentes mais il s'agit d'un terme passe-partout qui maquille des pratiques différentes.
* Les méthodes semi-globales commencent par une entrée globale avant de basculer vers le syllabique. La durée de la phase d'introduction globale varie d'un enseignant à l'autre.
Toutes ces méthodes ont leurs limites : la méthode syllabique monopolise toutes les ressources intellectuelles de l'enfant sur le déchiffrage et rend difficile l'accès au sens ; la méthode globale est neurologiquement contre-nature et n'aurait à la rigueur de sens que pour les langues orientales ; la méthode semi-globale implique un changement de cap qui peut être difficile à négocier ; le terme de méthode mixte ne veut rien dire puisqu'en réalité toutes les méthodes sont mixtes. L'idéal serait d'apprendre à lire d'abord de manière syllabique, en ne faisant appel au global que pour des mots comme "est" dont la décomposition serait contre-productive. C'est seulement une fois que l'enfant sait oraliser par décomposition qu'il devient intéressant de passer en global pour alléger l'effort de lecture et permettre la mobilisation d'une partie des ressources intellectuelles sur le sens.
III) L'âge du perfectionnement
Une fois que l'enfant maîtrise la lecture de textes simples, il est important qu'il s'entraîne à lire des textes de plus en plus longs, idéalement dans le cadre d'un projet choisi et non sous la contrainte. Il améliore ainsi son vocabulaire et son orthographe. La production écrite a également sa place à la maison au travers de projet comme la correspondance, l'entretien d'un blog ou d'un site internet.
Olivier BATTEUX